Interview de Ludovic Rosmorduc pour Les Mains de Dieu
Ludovic aux Hallienales 2012 |
A l'occasion de la sortie de son prochain roman à paraître le 19 février, Ludovic m'a fait Grand Joie d'accepter une humble interview sur le blog, pour vous, mes chers chasseurs et chasseuses. J'espère que vous prendrez plaisir à la lire comme j'ai eu plaisir de la recueillir.
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Chasseuse de Livre : Ludovic, je te remercie dans un premier de prendre le temps de répondre à ce petit interview. La dernière fois que je t'ai vu, c'était aux Hallienales de 2012, tu écrivais des romans fantasy/fantastique pour les jeunes adultes, de où t'es venue l'envie d'écrire pour un public adultes ?
Ludovic : J’ai effectivement quitté
la fantasy jeunesse, thème pour lequel j’avais eu la chance d’être invité aux
Halliénales pour un roman d’aventures
plus historique. Deux raisons à cela. La
première c’est que BAAM, la collection de jeunesse des éditions J’ai Lu qui
m’éditait a fermé boutique. J’avais donc deux choix, continuer dans la même
veine et rechercher un nouvel éditeur, quête longue et très incertaine, ou bien
me lancer dans un autre genre : adulte plutôt que jeunesse, « historique »
plutôt que fantasy, et le proposer aux éditions J’ai Lu. J’ai finalement opté
pour le second choix, d’une part pour voir si j’en étais capable et d’autre
part car plusieurs chroniques de blogueurs m’y avaient incité. J’espère que le
résultat plaira à ceux qui avaient aimé mes premiers romans, et notamment à la
fan d’Andréa H. Japp que tu es !
CDL : Chez toi le thème religieux prend beaucoup de place, ça allait donc de soi que ton nouveau roman
en parle à nouveau ? Et comment l'as-tu abordé ?
L : C’est vrai que le thème
de la religion prend beaucoup de place dans mes romans, mais cela tient surtout
au fait que mon imagination est nourrie par l’atmosphère médiévale, époque à laquelle
la religion tenait une place importante. Nécessairement donc, elle est aussi très
présente dans mes écrits. Comme je le
disais, j’avais décidé de m’attaquer à un roman plus adulte, mais, afin de
rester « en terrain connu » tout en profitant de l’expérience acquise
par l’écriture de mes trois premiers romans (ainsi que de l’accueil qui leur a
été réservé), j’ai décidé de rester dans l’ambiance moyenâgeuse qui m’inspire.
Plus jeune, j’avais passé des vacances dans le sud ouest, à l’ombre des châteaux
cathares dont les visites m’avaient vraiment enthousiasmé. Je me suis donc dit
que je tenais là le cadre idéal pour écrire un roman d’aventures historique
pour adulte. Cette époque étant marquée par la croisade contre albigeoises, le
thème de la religion était inévitable. Voilà pourquoi il est à nouveau très présent
dans ce dernier roman ! Je l’ai cependant abordé de façon un peu
différente cette fois-ci, car en ancrant mon histoire dans des lieux et à une
époque bien déterminés, il me fallait me documenter plus sérieusement. Dans un
monde imaginaire, on peut se permettre plus de libertés. Comme je ne suis absolument pas historien,
j’ai donc passé davantage de temps à la documentation pour essayer de rendre
mon histoire aussi crédible que possible !
CDL : Si tu devais être l'interprète d'un de tes personnages, lequel choisirais-tu et surtout pourquoi ?
L : Si je devais être
l’interprète d’un des personnages principaux de mon dernier roman, j’aurai le
choix entre Jehanne, une jeune femme de 17 ans, Théodore d’Havricourt, un vieil
érudit, ou bien le frère Norbert, un dominicain… Je ne me vois pas plus en jeune femme qu’en
religieux ! Reste donc Théodore. En
réalité, si je ne m’imagine pas vraiment être son interprète Théodore est mon
personnage préféré. Il est à la fois un sage, un philosophe et un scientifique,
un calculateur hors pair, bref un homme en avance sur son temps, à la manière d’un
Léonard de Vinci, le côté artiste en moins.
Désormais rattrapé par la vieillesse et pressé par les événements qu’il
va vivre, Théodore va être amené à revenir sur son passé, dont il n’est pas
toujours fier, à méditer sur sa vie passée et la sur vie en général. C’est sans
conteste de ce personnage que je me sens le plus proche, même si je suis loin,
très loin, d’avoir son érudition !
CDL : J'aime bien ta façon de voir le personnage féminin dans la fantasy, comme l'as tu traité dans ce
roman-ci ?
L : J’apprécie d’autant plus ton compliment que je trouve plus difficile de créer un personnage féminin que masculin. Voilà pourquoi il n’y avait aucune véritable héroïne dans deux de mes trois premiers romans. Dans Les Mains de Dieu, j’ai souhaité en faire apparaître un car le manque de personnage féminin m’avait déjà été « reproché » par certains lecteurs. L’approche que j’ai eue dans ce roman est différente. D’une manière générale, et pas seulement concernant Jehanne, j’ai essayé (les lecteurs me diront si j’ai réussi !) de travailler davantage mes personnages. Pour caricaturer, je dirai qu’avant je créais des personnages afin de pouvoir raconter une histoire, alors que cette fois-ci, j’ai plutôt raconté l’histoire de mes personnages, tout du moins une partie de leur histoire ; un moment de leur vie. En quelque sorte j’ai pris le contre-pied de ce que je faisais d’habitude, non plus des personnages au service d’une intrigue, mais une intrigue au service des personnages. Il me reste désormais à croiser les doigts pour que Jehanne te semble crédible, réelle. Vivante, quoi !
CDL : Tu écris des romans depuis quand ? Et comment t'es venue cette envie d'écrire ?
L : J’ai
véritablement commencé à écrire début 2007. Au départ l’idée m’a été soufflé
par mon frère avec qui j’écrivais de petits scénarios pour des jeux de rôles et
des jeux vidéos « médiéval-fantastique ». Un jour il m’a dit
« Et pourquoi tu n’essaierais pas d’écrire un roman ? ». Sur le
moment l’idée m’a paru plutôt saugrenue. Un soir pourtant j’ai allumé mon
ordinateur. J’ai ouvert mon traitement de texte et suis resté un long moment Ã
regarder le curseur noir qui clignotait sur la page blanche. Puis sans savoir
où j’allais, j’ai commencé à écrire. Je crois d’ailleurs que c’est précisément
ça le plus difficile. Sauter le pas. Oser commencer. Car au départ, il faut
bien l’admettre, ça paraît complètement insensé. Je ne pensais alors vraiment
pas arriver au bout. La seule chose que j’ai comprise en écrivant mes premières
phrases, c’est qu’écrire me plaisait. Inventer des histoires aussi. Après tout,
là était l’essentiel. J’ai donc continué !
CDL : Tu as des habitudes d'écriture : musique, café, silence, un lieu particulier ou tu écris quand tu veux
et où ça te chante ?
L : J’écris toujours chez
moi, Ã mon bureau. Il faut que je me sente dans mon « petit cocon »
pour que les idées viennent. Je n’écris jamais sans musique. La page blanche
est toujours effrayante, alors
l’affronter dans un silence de mort non merci ! Je me passe en boucle le
même genre de morceaux depuis le début. Des musiques qui m’aident à me plonger
dans l’univers moyenâgeux que j’essaie de construire. Cela va de musiques
médiévales à des musiques de films, voire bandes sons de jeux vidéos très
réussies (Skyrim notamment), en passant par des artistes comme Loreena Mc
Kennit. Suivant l’heure à laquelle j’écris, ca peut être un café effectivement,
ou, parfois, je le reconnais un verre de vieux whisky écossais !
CDL : Quel est le dernier roman que tu as lu ? Et qu'est ce qui t'as marqué dans ce livre ?
L : Le dernier livre que
j’ai lu, c’est Droods de Dan Simmons. Deux choses m’ont frappées. L’incroyable
travail de documentation et la longueur du roman. C’est titanesque. VoilÃ
typiquement le genre de livre qui me donne des complexes quand, ensuite, je me
mets devant traitement de texte. Un peu comme quand je viens de voir jouer
Roger Federer à la télé et qu’après je me retrouve sur le court de tennis, je
me dis : « Mais comment fait-il ? » !
CDL : On peut donc dire que ton style de roman c'est plutôt policier ou fantasy ? Car tu aimes bien
mêler ces deux genres, non ?
L : En règle générale je
suis plus polar/thriller pendant l’année, lorsque je consacre trop peu de temps
à la lecture. Je choisis des romans qui peuvent se lire vite, dans lesquels
l’action prime. Par contre lorsque je suis en vacances, lorsque je peux
fainéanter à loisir dans une chaise longue avec un bon gros bouquin, j’aime
bien me plonger dans des « pavés » d’aventures historiques. Parmi
ceux qui m’ont marqué il y a bien sûr les Piliers de la Terre de Ken Follet, la
Cathédrale de la Mer, d’Ildefonso Falcones. Le dernier que j’ai lu dans ce
style là est l’âme du Temple de Roby Young. J’ai bien aimé, mais il ne m’a pas
autant marqué.
CDL : Si tu devais résumé ton livre en quelques phrases, lesquelles seraient-elles ?
L : C’est un exercice
difficile que tu me demandes… Trop même. J’ai passé deux années à écrire cette
histoire, et j’aurai trop peur de gâcher tout ce travail en proposant un résumé
qui ne serait pas attrayant… Je dirai donc seulement que ce dernier roman est
celui qui a nécessité le plus gros investissement. Sans bien sûr renier les
précédents, sans lesquels j’aurai d’ailleurs été bien incapable d’écrire
celui-ci, je crois que c’est le plus abouti. J’ai l’impression d’avoir crée des
personnages plus réels que dans mes autres romans. En tout cas le vide à pour
moi été plus grand quand j’ai posé le point final. Le fait d’avoir ancré
l’histoire dans une époque bien précise, dans des lieux existant, facilite
l’immersion et rend l’ensemble de l’intrigue plus réaliste. C’est en tout cas
ce que je crois, ce que j’ai essayé de faire, mais ce n’est pas à moi de dire
si j’ai réussi !
CDL : Imagine, tu as devant toi une foule de personnes qui ne connaissent pas du tout ton roman que
leur dirais-tu pour les amener à le lire ?
L : Avec une foule de
personne devant moi je serai bien intimidé ! Je suis plus à l’aise devant
un ordinateur que devant un auditoire, mais j’essaierai de les convaincre en
leur disant qu’Ã mon sens il n’y a pas plus propice au merveilleux que le moyen
âge. En cela, je rejoins totalement Carole Martinez qui, dans son roman
« Du domaine des murmures » faisait dire à son héroïne du XIIe siècle
à peu de choses près ceci : Tu ne peux pas te rendre compte lecteur
combien notre époque est perméable au merveilleux. C’est exactement ce que j’ai
toujours ressenti. Pour moi le merveilleux ça n’est pas ailleurs dans l’espace dans
un autre monde, mais ailleurs dans le temps. Dans notre propre passé. Les
hommes et les femmes du douzième siècle croyaient au merveilleux, et, de ce
fait, le merveilleux existait. Réellement. Voilà pourquoi il n’est, pour moi,
rien de plus dépaysant qu’une plongée au cÅ“ur du moyen-âge pour se changer les
idées !
Cher auditoire, je te propose donc de rejoindre
l’année 1216, de faire la connaissance de Jehanne et Théodore et de te laisser
entraîner, à leurs côtés, dans une petite balade qui te conduira de Carcassonne
à Conques, en passant par le château de Peyrepertuse
1 commentaires :
Write commentairesUn bien jolie interview, quel dommage que j'ai beaucoup de mal avec les livres historiques et surtout ceux qui traitent de la religion sinon je me serait bien laissée tenter ! :D
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